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La révolution du poireau

J'aime bien mon bouquiniste, il est rafraîchissant. Il organise un ciné-club intitulé (R)évolutions à l'Equitable Café, et se désole de constater lors des débats que la plupart des gens croient encore en la capacité des politiques à améliorer l'état du monde en crise. «"Si la gauche passe, ce sera différent..." mais c'est de la foutaise, ça ! Une vraie façon de changer les choses, ce serait de consommer différemment. Ca demande de s'informer, de réfléchir un peu, c'est sûr, c'est moins facile que de camper devant TF1 et d'engraisser les mastodontes de la consommation... Regarde, en face, le Carrefour City ne désemplit pas, alors que la petite épicerie bio d'à côté qui ne vend pas plus cher ne s'en sort pas faute de clients ! Si on changeait massivement nos usages, en moins d'un an le visage du monde serait différent, sans violence, en abandonnant juste les politiques et la finance à leur triste sort. »

Il se désole, parce qu'il pense que ce n'est pas demain la veille, qu'hormis trois bobos et deux militants le grand public n'est pas prêt de lâcher TF1 et la mentalité qui va avec... Moi je crois qu'il se trompe un peu, que les 99 % ne vont pas se laisser faire indéfiniment. Comme dans l'histoire de la grenouille qui accepte de cuire à petit feu : là ça commence à sentir tellement le roussi qu'elle va réagir avant qu'il ne soit trop tard, non ?

Enfin bref, je crois surtout qu'il est pessimiste, parce que je vois partout des signes de changement, et pas seulement dans notre quartier de bobos. A la Rouguière, par exemple, où depuis le mois d'août un jardin collectif a poussé en bas des tours. Un magnifique jardin que m'a fait visiter Patricia Plessis de l'association Couleurs Femmes. Ce sont les jeunes de la cité qui ont défriché le terrain, les habitants appuyés par le PADES (1) qui le cultivent. Sur chaque parcelle des choux, salades, courgettes, tomates, haricots verts, des fleurs aussi.

« Nous avons envie que notre quartier soit beau. Nous avons envie de rêver. Ici les gens veulent tous le changement, et nous avons besoin de nous rassembler » me dit Nordine Benguerroud qui travaille au Centre Social de la Rouguière depuis des années et a vu la cité se dégrader.

Patricia renchérit : « Eh oui, les jardins, tout le monde s'y retrouve, tous les âges, toutes les cultures. On revient à la terre, on est sûrs de ce qu'on mange, de bons produits tout bios qui ne se sont pas baladés depuis l'Espagne. Ca soulage le budget fruits et légumes, et puis c'est beau de les voir pousser. Après la pluie, c'est magnifique, je viens dans le jardin observer les papillons et les abeilles travailler..»

Voilà, rien que ça, moi, ça me fait chaud au coeur. D'après elle, la pratique des jardins collectifs est en voie de se généraliser, d'autres initiatives voient le jour aux Néréïdes ou vers le Burel. Pour le coup, on ne peut pas dire que ce sont des bobos qui opèrent cette révolution du poireau, qui boycottent Carrefour et qui produisent et consomment local et autonome...

Alors bravo, et longue vie aux jardins de la Rouguière !

1 Programme Autoproduction et Développement Social : http://www.padesautoproduction.net/

 

Gaëlle Cloarec
Club de la Presse Marseille Provence :
Gaëlle Cloarec, journaliste pigiste sur Marseille