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Articles parus dans la presse écrite :

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« Notre environnement de vie est en train de s'effondrer »

Évaluer l'impact de l'activité humaine sur la biodiversité, notamment à travers les effets du changement climatique : une nécessité à laquelle s’emploie Franck Courchamp (1), chercheur au CNRS en écologie, discipline scientifique qui s'intéresse aux interactions du monde vivant. Et les nouvelles ne sont pas bonnes.

Qu’en est-il des liens entre biodiversité et réchauffement climatique ?

Sur la planète, certains politiciens ne croient pas au changement climatique. La biodiversité, elle, si ! Les données récoltées ces dernières décennies sont très claires : les espèces changent d'ère de distribution, elles « suivent leur climat ». Leur phénologie (2) évolue : les végétaux bourgeonnent hors saison, les animaux migrent ou hibernent plus tôt... Les espèces à sang froid, étant plus stimulées par temps chaud, se reproduisent davantage. Les écologues constatent des migrations invasives, favorisées par les hivers doux, telles que celles de la pyrale du buis, un papillon, ou de la chenille processionnaire du pin. Les espèces locales souffrent à la fois du changement climatique et de ces invasions.

Comment les chercheurs évaluent-ils ces phénomènes ?

Il existe de nombreux modèles mathématiques pour mesurer les conséquences du changement climatique induit par l'homme, mais les méthodes n'ont pas toutes la même échelle géographique ou temporelle. En moyenne, la perte de biodiversité est évaluée à 15 ou 20% d'ici 2050. Ce qu'il faut retenir, c'est que c'est énorme. Les dix dernières années sont celles de tous les records, avec une augmentation - en forte accélération par rapport aux décennies précédentes - des phénomènes climatiques extrêmes, des sécheresses, tempêtes et inondations.

Quelles peuvent être les conséquences sur la santé humaine de cette aggravation ?

Si 1/5e de la biodiversité est perdue, l'agriculture, donc notre nourriture, et nos ressources médicamenteuses, seront en chute libre. Quand les scientifiques parlent d'un réchauffement de 2°C, les gens s'imaginent qu'il fera juste un peu plus chaud, mais il faut garder à l'esprit qu'il s'agit d'une moyenne (3). Lors de la dernière période glaciaire, qui s'est achevée il y a dix mille ans, la planète a connu une baisse de 6°C : il était possible d’aller à pied en Angleterre ! La plupart des espèces peuvent supporter un écart de 1 ou 2°C, mais pas plus : elles sont très sensibles au changement.

Selon vous, comment évolue la perception de la question environnementale dans notre pays ?

En tant que pays riche, très consommateur, la France a une lourde responsabilité : elle fait partie des États qui pèsent lourdement sur la biodiversité au niveau mondial. Et trop de français ne savent pas pourquoi celle-ci est importante. La prise de conscience y est insuffisante. Beaucoup se sentent davantage concernés par le score au football ou le testament de Johnny Hallyday... Or, notre environnement de vie est en train de s'effondrer. Les scientifiques tirent la sonnette d'alarme depuis des décennies, mais les gens regardent ailleurs.

Que peut-on faire en tant que citoyen ?

Énormément de choses. Je n'en citerai qu'une : manger moins de viande. Le bétail est l'une des causes essentielles de la déforestation ; il représente 60% des mammifères sur Terre. Nous sommes omnivores, néanmoins manger de la viande 2 ou 3 fois par semaine maximum n'entraîne aucune carence, alors qu’en consommer tous les jours est très mauvais pour la santé : cela provoque des problèmes cardiaques, de cholestérol et d'acide urique. La surconsommation de viande résulte d'une stratégie mise en place après-guerre, pour développer les élevages industriels de volailles ou de porcs.

Aujourd’hui, la meilleure chose à faire est de surveiller sa consommation et de s’informer.

Propos recueillis par Gaëlle Cloarec

  1. Auteur de L'Écologie pour les nuls, paru en 2009 aux éditions First.
  2. Étude des variations des phénomènes périodiques de la vie animale et végétale, en fonction du climat.
  3. L'Accord de Paris, signé en 2015 lors de la conférence des Nations unies sur les changements climatiques, envisage une baisse mondiale des gaz à effet de serre pour maintenir le réchauffement global sous la barre des 2°C.

 

Enrayer l'érosion

La Colombie a accueilli en mars dernier l'IPBES (plateforme intergouvernementale sur la biodiversité et les services écosystémiques), équivalent du fameux Giec (groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat), mais pour la biodiversité. 550 scientifiques internationaux ont dressé un bilan alarmant de l'état du vivant, notamment dans les sols et les océans. Ils appellent à une prise de conscience politique, traduite systématiquement dans le droit, l'économie, la fiscalité. Et ils soulignent l’importance d’intégrer populations des pays pauvres et peuples autochtones, affectés directement par la perte de biodiversité, dans les processus de décision.


Gaëlle Cloarec
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    Gaëlle Cloarec, journaliste pigiste sur Marseille